Messieurs les Ministres,

Mesdames et Messieurs,

Chers Amis,

Je suis heureuse d’être parmi vous aujourd’hui car pour moi, comme pour beaucoup d’entre nous, le Forum Paris-Casablanca est devenu désormais un rendez-vous incontournable. Je le suis d’autant plus aujourd’hui parce que la collaboration franco-marocaine retrouve enfin sa force habituelle.

Pour certains, c’est l’occasion annuelle de partager de nouvelles réflexions. Personnellement, c’est une occasion supplémentaire et combien agréable d’éviter naturellement de mettre des gants.

Si vous le permettez, arrêtons-nous quelques instants sur ce choix d’appellation « Paris-Casa ». Quelle prémonition que d’avoir cru il y a 20 ans qu’un axe aussi fort puisse devenir le rendez- vous qui pense le changement, un rendez-vous qui anticipe les mutations et élabore des préconisations dans l’intérêt de tous, et particulièrement pour notre Continent en devenir, l’Afrique.

Je tiens à saluer ici toutes celles et tous ceux qui ont participé à cet effort commun et n’ont compté ni leur temps ni leur énergie. 

 

Merci donc à Monsieur le Président Albert MALLET, Merci à Madame Nadia Salah, ainsi qu’à toutes vos équipes.

Mesdames, Messieurs,

Ce forum est un rendez-vous phare de la vie économique et au-delà, et les thèmes qui y sont abordés précèdent souvent l’actualité.

Les événements nous démontrent à quel point les choses changent, que tout bouge vite, chez nous comme autour de nous.

Nous savons tous que les interrogations profondes qui traversent nos sociétés impactent sur nos manières de penser et d’agir, et pour nos entreprises, de commercer et d’investir.

Nos sociétés sont en quête de repères, de nouvelles valeurs. Sans vision claire, elles peuvent être tentées par des choix extrêmes, le choix de la soumission aux seules lois du marché, ou celui de la concurrence et de la déréglementation, le choix de la xénophobie, de la diabolisation de "l'autre", prônées par toutes formes d’intégrismes ….

Il nous faudra savoir appréhender ce « grand tournant » où nous avons eu en moins de dix ans 2,5 milliards de personnes connectées à internet alors qu’il y a encore 800 millions d’analphabètes.

 

Nous savons déjà que du fait de l’exode rural grandissant, 55 % de la population mondiale vit en ville (80% dans certains pays), que nous serons plus de 9 milliards sur Terre en 2050 et que notre agriculture devra croître de 60%.

Il nous faudra savoir protéger les citoyens de la menace terroriste sans remettre en cause les principes fondamentaux de l'État de droit. Comment recréer les conditions de sécurité durable dans le monde pour les citoyens et pour les entreprises.

Il nous faudra savoir adapter davantage le système éducatif au marché du travail. Malgré une progression de la formation de la jeunesse, le diplôme ne protège plus, ni en Occident, ni dans le reste du monde. Nous devrons répondre à la douloureuse constatation, « Pourquoi dans les pays émergents ou pré-émergents les jeunes diplômés sont-ils souvent au chômage? »

Or nous savons combien cette jeunesse, résolument tournée vers l’avenir, peut être un puissant moteur de transformation politique, sociale et économique.

Il nous faudra savoir agir en faveur d'une meilleure gouvernance d’entreprise et d'une meilleure sécurité financière au niveau mondial alors que la corruption occupe encore trop le terrain dans de nombreux pays. 

 

Nous devrons être éclairés sur quels modèles économiques pour nos entreprises, quelle fiscalité, quels nouveaux moyens à mettre en oeuvre?

Quel sera le rôle pour les finances alternatives et autres finances solidaires ?

Enfin, il nous faudra savoir comment promouvoir des sociétés innovantes et sûres, assurant l'insertion de tous dans un contexte de transformations sans précédent et d'interdépendances mondiales croissantes.

Monsieur Mallet, Chère Nadia,

Toutes ces interrogations sont esquissées à dessein dans votre document de présentation de cette 6ème édition.

Pour répondre à toutes ces interrogations, et j’en suis convaincue, nous devons d’abord vérifier si nos instruments de pensée sont adaptés car il est fort peu probable que demain se contente d’être le prolongement d’hier.

Chacun d’entre nous, ici présent, sait combien l’économie et en son sein, les entreprises, sont un élément majeur de la vie politique. Nous savons aussi qu’une bonne dynamique économique s’inscrit forcément dans un climat de confiance et de stabilité. 6

Malheureusement, beaucoup de gouvernements à travers le monde, ne savent pas forcément insuffler dans les faits ce climat de confiance, ils étriquent leurs actes dans une optique politicienne.

Il me tarde d’écouter M. Shantayanan DEVARAJAN de la Banque Mondiale et spécialiste de notre région, nous dire « Comment le développement économique peut concerner le plus grand nombre ? ».

Je suis convaincue que nous ne passerons pas d’un monde dominé par une superpuissance à un monde multipolaire comme on passe d’une ville à l’autre. Autrement dit l’émergence de la multipolarité pose un premier défi : celui de la gestion des conséquences de la fin du leadership économique mondial.

Le Nord peut-il encore se permettre de continuer à faire simplement semblant de comprendre les aspirations économiques et sociales des pays du Sud. Je suis, pour ma part, convaincue qu’il serait judicieux d’aller au-delà des simples ajustements et de penser aujourd’hui les nouveaux enjeux mondiaux du point de vue des pays émergents et non pas des seuls intérêts des pays avancés.

L’équation que nous pose modestement ce forum se résoudra si l’on arrive à intégrer les trois dimensions : sociale, économique et écologique. Elle passera par la capacité des élites politiques et économiques à rapprocher leurs visions et à dialoguer dans la confiance mutuelle et forcément en y introduisant plus d’éthique. 

 

Permettez-moi donc en ces temps difficiles d’évoquer le nom d’un grand humaniste, le Professeur Mohamed Arkoun, qui disait :

« L’éthique ne consiste pas à faire la morale aux gens….il faut montrer en même temps l’échec de toutes les instances et mettre en lumière les éclats de raison qui émergent dans le monde ».

A la lecture du programme de cette journée et à la qualité des intervenants, je suis certaine que de ces échanges surgiront de véritables idées de progrès, car gardons à l’esprit que « le futur ce n’est pas ce qui va se passer mais ce que nous allons faire ».

Je vous remercie.

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